Dear Reader,
This week, I’m doing something I’ve never done before in this newsletter. I’m publishing an essay in French. If you’ve been a longtime reader of OBSESSED, you know I’m from Québec and that I’m bilingual. I was raised by a French-speaking Canadian father and an English-speaking Scottish mother.
Being bilingual is great, but sometimes I feel “in-between” cultures. I don’t know if “cultures” is even the right word. Identities. Dimensions. Worlds? Anglophones tell me that “my English is good for a French-speaking person”, and francophones outside of Québec respond to me in English when I speak to them in French. They’re not familiar with the Québécois accent and assume I’m making an effort to practice French as a second language or something.
Sometimes I wonder where I fit in, especially when it comes to art. I love writing in English. For as long as I can remember, I’ve been creating in that language. It feels more natural. But I prefer speaking French. And that feels more natural. It’s weird!
I contain multitudes. We all do. So I figured I’d explore what it feels like to write in French. Plus, Québec’s national holiday, la Saint-Jean-Baptiste, is coming up on the 24th of June.
Lastly, I recorded myself reading the essay so those of you who aren’t familiar with Québécois French can hear what it sounds like.
Y’a rien que je déteste plus que de me faire envoyer des liens ou des vidéos à regarder. J’hais ça. Ça ne me tente pas de cliquer sur des liens. Je n’ai pas besoin de plus de contenu dans ma vie. Y’en a partout sans que je fasse le moindre effort. Une autre chose que j’hais profondément, c’est le mot « contenu ».
Je peux ben parler. J’en post du contenu sur mes réseaux. Y’a pas une semaine qui passe sans que j’encourage mes « followers » (un autre mot que j’hais) de lire mes textes ou de liker mes poèmes. C’est tannant, cette game de visibilité. C’est tannant parce que que j’ai envie de partager mon art. Mais une fois que ton art se ramasse sur les réseaux, ça devient un produit que les gens peuvent consommer, ou non. Trop souvent on se laisse emporter par la croyance que si ton art produit n’est pas perçu consommé par un maximum de personnes, ça ne vaut pas la peine de le partager parce que dans le fond, c’est de la marde. Mais c’est pas vrai! Comme c’est sournois, cette game de visibilité.
Nous vivons dans une ère de contenu, de clics et de swipes, let’s go on consomme, consomme, consomme. Regardez-moi. Regardez-le. Regardez-la, elle. Likez-le, son poème.
Ceci dit, y’a une sorte de contenu que j’aime découvrir par le biais d’un petit lien déposé dans mon Messenger ou mon Whatsapp. Ce sont des vidéos authentiques et attachantes qui mettent en scène un personnage particulier. J’appelle ça les petits bijoux québécois.
C’est quoi un petit bijou québécois? C’est une sorte de diamant Made in Québec. Quelque chose dont je ne saurais me passer, parce qu’en témoigner, le vivre, et oui, en consommer m’infuse avec une énergie difficile à expliquer. Je ressens un mélange d’euphorie et de fierté quand je visionne ces petits bijoux québécois.
Le petit bijou québécois, dans le fond, c’est une madame. Une madame authentique. Québécoise. À la fois vulnérable et honnête. Humoriste insouciante. Le genre de madame qui te vend des patchs Karine Joncas au Familiprix et qui t’appelle toune. La madame à l’autre bout de la ligne à la RAMQ qui te conseille comment gérer ton assurance maladie pendant ton absence du Québec. Elle utilise des expressions comme «R’garde, moa te faire une affaire…» et «Kessé qui fait dans vie, ton conjoint?» Le genre de madame qui se présente au Palais de justice de Trois-Rivières avec son coat en cuir et qui n’a pas peur d’affronter les journalistes en faisant claquer ses petits talons blancs.
Les Yolande Ouellet de ce monde. Je les adore, mes petites madames québécoises. Ça en est une obsession.
Vous savez de quoi je parle. Ces vidéos qui se retrouvent sur Youtube. Je les regarde en boucle. J’étudie leurs performances comme si j’auditionnais pour un rôle dans une série télé. Leurs monologues, de vrais tours de force, sont une source de richesse linguistique qui me rend si fière d’être Québécoise.
Je n’ai pas le choix. Je dois partager leurs monologues ici. Je dois honorer leurs mots, immortaliser par écrit leurs performances.
Commençons par notre belle Yolande Ouellet.
C’t’un p’tit baveux qui partageait pas le chemin. Y’avait un p’tit char bleu marin pis y voulait pas me faire passer alors y’a rentré dans mon auto. Pis moi j’ai répliqué, j’ai rentré dans la sienne.
Vous comprenez ce que vous voulez ou ce qu’y a dit. Où est-ce qu’il est le p’tit bum? Y devrait être icitte à matin lui. Pis y’en avait deux qui le suivaient en arrière pis c’est ses deux chums. Deux bums aussi. Y’en a trois d’impliqué là-dedans. Pis eux autres y m’ont barré l’chemin avec leur p’tit chars gris, pis j’pouvais rentrer dedans.
-Yolande Ouellet de Trois-Rivières
L’autre vidéo que j’aime regarder c’est celle de la dinde noire.
J’étais étendue sur mon couch. Je vois une grosse bibitte noire qui s’en vient vers ma fenêtre. Je crie au meurtre, je prends mes couvertes, je m’abrille par la tête ça fait KABOOM! Y s’en vient en bas je criais y’a une bibitte noire dans le salon.
(Pointant son lazy boy) Elle a uriné dessus. Elle a même fait des selles dans maison. C’tait plein de vitre. Le monsieur qui est venu ici, Jerry, y’en r’venait pas la dinde qui avait fait un ravage de même dans maison.
(Pointant des morceaux de vitre sur un meuble) Vois-tu? Y’en a tout partout so imagine toé din couch, r’garde ça c’est de la vitre. Imagine toé din couch qu’est-ce que ça peut faire ça.
C’est parce qu’y disent que c’tun animal pis qu’y’a aucune assurance qui couvre ça, les dégâts d’un animal. Mais c’est pas moé qui a appelé la dinde sauvage, qu’a vienne icitte. C’est pas moé qui la nourrit. J’ai dit j’pensais que j’tais full pin assurée. Tu m’as dit que j’avais la meilleure assurance, pis une chose comme ça arrive… Pis on n’a pas d’aide de vous autres.
J’ai perdu une chaise lazy boy pis tout ça. Pis c’est encore plein de vitre pis j’ai même pas le courage de r’faire e-rien dans maison.
J’ai juste ce film-là dans ma tête. Constamment. Qu’a va r’venir la dinde noire.
- Céline Poulin de Templeton
Finalement, un petit dernier que mon mari vient de me faire découvrir. Julie Bertrand, la femme du journaliste sportif Réjean Tremblay, en direct de la Floride à l’émission de Denis Lévesque. Disclaimer: Il m’a envoyé la version parodiée de la comédienne Ariel Charest. Du vrai bonbon. Je capote.
Je vais souvent à Montréal. Je descends de Sainte-Adèle à Montréal, j’va te donner un exemple, pour me faire coiffer. J’calcule une heure et demie, alors que ça prend cinquante minutes. J’arrive sur la rue. Je descends sur la 15. Y faut que je mette mon cruise à 120 pour pas m’faire prendre. Ben, prendre… pour pas avoir un ticket.
Après ça j’arrive sur la rue Clark. C’est descendu entre 30 et 40 kilomètres. Kessé ça? Trente et quarante… ça veut dire que les bicyks à pédales vont à la même vitesse que moi. J’arrive ici (en Floride), j’ai ma belle Audi parce que moi, j’aime ça conduire en décapotable. J’m’en va à Fort Lauderdale qui est plus loin que Montréal—Sainte-Adèle ou Sainte-Adèle—Montréal et j’peux rouler à 140. Et moi là, si j’ai le goût de rouler à 140, sais-tu quoi? J’le prend le risque.
C’est ça la liberté de penser. Live free or die! J’peux-tu faire c’que j’veux? Denis, je suis une personne de 53 ans. J’ai tu le droit de décider à mon âge ce qui est bon pour moi? Sans que poppa pis moman du gouvernement le décide?
J’ai un sérieux problème d’iguanes. Pis quand les iguanes, je suis capable, je les tue. Y me dit, «tu tues des iguanes?» J’ai dit ben oui. J’ai un sérieux problème. Y dit «kessé que ta voisine va penser?» J’y dit… Ma voisine va être contente parce que si je tue l’iguane, le problème ira pas chez elle.
-Julie Bertrand de Sainte-Adèle
À la semaine prochaine!
Félicitations ma belle Québécoise Michelle Béland. J'aime énormément tes articles. Continue ma belle. Je t'aime xxx Loulou
Très apprécié ce texte en français, Michelle, et ce clin d'oeil à la Saint-Jean! Tu as autant de talent dans tes deux identités.